La DGCCRF publie des lignes directrices pour l’encadrement des promotions pour les produits alimentaires et l’interdiction du terme « gratuit ». Ce document explicite les conditions dans lesquelles les nouvelles règles prévues en matière de limitation des offres promotionnelles seront mises en œuvre par les services de la DGCCRF. Il est susceptible de modifications ou d’évolution à la lumière des pratiques constatées par les services de contrôle ou portées à la connaissance de la DGCCRF par les acteurs économiques.
L’objet du présent document est d’expliciter les conditions dans lesquelles les nouvelles règles prévues en matière de limitation des offres promotionnelles seront mises en œuvre par les services chargés de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Il est susceptible de modifications ou d’évolution à la lumière des pratiques constatées par les services de contrôle ou portées à notre connaissance par les acteurs économiques.
Encadrement des promotions
L’article 3 de l’ordonnance n° 2018-1128 du 12 décembre 2018 relative au relèvement du seuil de revente à perte et à l’encadrement des promotions pour les denrées et certains produits alimentaires prévoit un encadrement en valeur et en volume des avantages promotionnels, immédiats ou différés, ayant pour effet de réduire le prix de vente au consommateur de denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie.
Encadrement en valeur
L’ordonnance susvisée prévoit que les avantages promotionnels, le cas échéant cumulés, pour un produit déterminé, ne peuvent pas être supérieurs à 34% du prix de vente au consommateur ou à une augmentation de la quantité vendue équivalente. Ces dispositions sont entrées en vigueur « à titre expérimental » le 1er janvier 2019 pour une période de deux ans.
L’encadrement en valeur ne concerne que les offres portant sur un produit déterminé, dont le prix est annoncé en baisse par le distributeur par rapport au prix de vente au consommateur, ou dont la quantité est augmentée par rapport au conditionnement habituel sans augmentation de prix correspondante. Ces dispositions s’appliquent donc aux seules annonces de réduction chiffrées.
Dans ce cadre, l’administration a établi, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, une liste non exhaustive d’opérations promotionnelles entrant ou non dans le champ d’application de cette règlementation.
Offres promotionnelles incluses dans le champ d’application de l’encadrement en valeur
Les opérations offrant les avantages promotionnels suivants entrent en tout état de cause dans le champ d’application de l’encadrement en valeur.
- Les offres avec annonce d’une réduction de prix chiffrée (ex : « moins X% ») ;
- Les offres assorties d’une augmentation de quantité offerte (du type « dont X% offert » ou « plus X% offert » ou « 2 +1 ») ;
- Les avantages de fidélisation ou de cagnottage affectés à un produit : l’achat d’un produit précis donne droit à l’obtention d’un montant déterminé et chiffré (cumulé sur une carte de fidélité ou faisant l’objet d’un bon de réduction), que le consommateur pourra utiliser ultérieurement soit pour un achat, du même produit ou d’un produit différent, soit en déduction du montant total de ses achats, dans un établissement de la même enseigne (ex. : « X% du prix du produit cagnotté sur la carte de fidélité du magasin ») ;
- Les bons de réduction accordés par les fournisseurs sur un produit déterminé (bons à imprimer, coupons, ou remboursements après envoi de la preuve d’achat au fournisseur – ex : « X centimes déduits » ou « X centimes remboursés »). Dans le cas d’un produit porteur d’un bon de réduction différée affecté à un produit déterminé, la vérification du plafond en valeur des promotions sera effectuée sur le prix du produit sur lequel la réduction porte[1].
Par ailleurs, dans le cas où un même produit bénéficierait de manière cumulative de plusieurs offres (par exemple à la fois d’une offre avec réduction de prix chiffrée et d’un coupon de réduction mis en place par le fournisseur), la réduction de prix cumulée dont bénéficiera le consommateur ne pourra excéder 34% du prix de vente. Dans cette hypothèse, il revient donc au distributeur de prendre en compte l’existence d’un éventuel avantage octroyé par le fournisseur avant de mettre en place une offre promotionnelle.
Offres commerciales non incluses dans le champ d’application de l’encadrement
- Le cagnottage non affecté à un produit : l’obtention d’une cagnotte (sur la carte de fidélité ou par le biais d’un bon de réduction), que le consommateur pourra utiliser ultérieurement, n’est pas liée à l’achat d’un produit déterminé mais, par exemple, à l’achat d’un montant donné sur une certaine période et sur l’ensemble ou une catégorie de produits proposés à la vente par le magasin ; il s’agit par exemple de l’obtention d’un montant de 10 euros sur la carte de fidélité si le montant total des produits achetés à une date particulière dans le magasin ou sur un rayon donné est supérieur à 50 euros ;
- Les pratiques de prix présentés comme avantageux pour le consommateur sans annonces de réductions de prix chiffrées mais avec des annonces littéraires du type « prix choc », « prix bas » ;
- L’offre d’un produit différent, y compris alimentaire, pour un ou plusieurs produits identiques achetés (vente avec prime) ;
- Les avantages promotionnels portant sur des produits périssables dès lors qu’ils sont menacés d’altération rapide, à condition que l’avantage promotionnel ne fasse l’objet d’aucune publicité ou annonce à l’extérieur du point de vente.
Il appartiendra au distributeur de prouver aux services de contrôle que des produits étaient menacés d’une telle altération par tout moyen à sa disposition.
Les opérateurs pourront consulter la DGCCRF en cas d’interrogation sur des pratiques promotionnelles non répertoriées dans ce document et celui-ci sera le cas échéant complété.
Encadrement en volume
Outre la limitation en valeur des avantages promotionnels, l’ordonnance prévoit également que ces avantages, accordés par le fournisseur ou par le distributeur, doivent porter sur une quantité de produits ne représentant pas plus de 25 % d’un volume ou d’un chiffre d’affaires déterminé à l’avance par les parties au contrat.
Champ d’application identique à celui de l’encadrement des promotions en valeur
Les avantages promotionnels pris en compte pour l’encadrement des promotions en volume sont identiques à ceux pris en compte pour l’encadrement des promotions en valeur. Ainsi, tous les produits alimentaires offrant un avantage promotionnel soumis à l’encadrement en valeur entrent dans le calcul de l’encadrement en volume.
Détermination de l’assiette des 25% de l’encadrement en volume en fonction de la relation contractuelle
Quelle que soit la relation commerciale, les dispositions de l’ordonnance impliquent que les parties au contrat conviennent :
- d’un chiffre d’affaires prévisionnel, s’ils signent une convention annuelle en application de l’article L. 441-7 du code de commerce ;
- d’un volume prévisionnel, si le fournisseur produit pour les besoins spécifiques du distributeur des produits sous marque de distributeur ;
- d’un engagement de volume, pour les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d’animaux vifs, de carcasses ou pour les produits de la pêche et de l’aquaculture.
Ces chiffres d’affaires ou volumes prévisionnels inscrits par les parties au contrat serviront d’assiette à l’encadrement des promotions en volume.
Relation contractuelle régie par la convention prévue à l’article L. 441-7 du code de commerce
Les fournisseurs et les distributeurs devront s’assurer que la valeur à l’achat des produits revendus en promotion ne dépasse pas 25% du chiffre d’affaires prévisionnel (« sell in », entre fournisseur et distributeur, et non « sell out », auprès du consommateur) stipulé au contrat[2].
Illustration d’application de l’encadrement des promotions en volume pour un contrat soumis à l’article L. 441-7 du code de commerce :
Ces dispositions sont applicables à tous les contrats conclus pour régir la relation d’affaires de l’année 2019 et qui doivent être signés avant le 1er mars 2019 en vertu du 5e alinéa de l’article L. 441-7 du code de commerce.
Relation contractuelle portant sur des produits sous marque de distributeur ou des produits agricoles
Les fournisseurs et les distributeurs devront s’assurer que la quantité de produits (nombre d’unités, poids, litres, etc.) en fonction de la référence retenue par les parties) revendue en promotion ne dépasse pas 25% du volume prévisionnel (pour des produits sous marque de distributeur, dont la conception et la production se font selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l’acheteur) ou des engagements de volume (pour des produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d’animaux vifs, de carcasses ou pour les produits de la pêche et de l’aquaculture) prévus par le contrat.
Point d’attention relatif aux contrats en cours d’éxécution
Contrairement aux produits vendus dans le cadre d’un contrat rendu obligatoire par l’article L. 441-7 du code de commerce, les produits sous marque de distributeur et les produits agricoles périssables sont soumis depuis le 14 décembre 2018 à l’encadrement des promotions en volume.
En effet, l’article 7 de l’ordonnance prévoit que ces dispositions sont applicables pour ces produits à tout contrat conclu avant la publication de l’ordonnance et toujours en cours d’exécution à cette date.
Cette application de l’ordonnance aux contrats en cours d’exécution implique pour les fournisseurs et distributeurs de prévoir un volume prévisionnel (pour les produits sous MDD) ou des engagements de volume (pour les produits agricoles périssables) pour la durée restante d’application du contrat.
Ainsi, le respect de l’encadrement des promotions en volume sera évalué en comparant la quantité de produits revendus en promotion entre le 14 décembre 2018 et la fin du contrat, et le volume prévisionnel ou les engagements de volume prévus par les parties au contrat.
Si les parties avaient déjà prévu un volume prévisionnel ou des engagements de volume, la comparaison se fera sur un prorata de ce volume, pondéré le cas échéant en fonction de la saisonnalité du produit (notamment la saisonnalité).[3]
Interdiction d’utilisation du terme «gratuit »
L’article 16 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible a modifié l’article
L. 441-2 I du code de commerce afin de prévoir l’interdiction pour les opérateurs de vente d’utiliser le terme « gratuit » dans la promotion d’un produit alimentaire.
Date d’entrée en application
Ces dispositions sont applicables depuis le 2 novembre 2018 puisqu’elles n’ont été assorties ni de dispositions transitoires, ni de mesures spécifiques d’application qui permettraient d’assurer leur mise en œuvre progressive ou leur entrée en vigueur différée.
Produits alimentaires concernés
Le texte est rédigé de telle sorte qu’il traduit la volonté du législateur d’interdire l’utilisation du terme « gratuit » pour l’ensemble des produits alimentaires (denrées alimentaires et produits pour animaux de compagnie.
Termes dont l’emploi est interdit
Ces dispositions étant d’application stricte, seule l’utilisation du mot « gratuit » est interdite. Ainsi, il semble que des termes dérivés ou synonymes, comme par exemple « offert », peuvent être librement utilisés par les opérateurs.
Définition des outils marketing et promotionnel
La loi vise l’emploi du terme « gratuit » comme « outil marketing et promotionnel » ; l’interdiction s’applique donc à toute forme de communication et à tout support utilisant le mot « gratuit » dans le but d’influencer le comportement d’achat des consommateurs.
Ainsi, l’interdiction vise aussi bien la mention « gratuit » apposée dans un catalogue promotionnel, que sur l’emballage d’un produit alimentaire ou sur un affichage publicitaire sur les lieux de vente.
Opérateurs de vente concernés
Les opérateurs de vente, au sens des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 441-2 du code de commerce, doivent s’entendre comme l’ensemble des professionnels proposant à la vente des produits alimentaires, à d’autres professionnels ou à des consommateurs.
Dès lors, conformément à l’article 121-3 du code pénal, il reviendra au juge d’établir si l’auteur des faits a, ou non, volontairement commis une infraction, compte tenu notamment des moyens dont il disposait, et le cas échéant, de lui infliger l’amende correspondante de 15 000 euros.
Modalités de contrôle par la DGCCRF
Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en charge du contrôle du respect des dispositions du titre IV du livre IV du code de commerce, tiendront compte, à l’égard des entreprises assujetties à l’article L. 441-2 de ce code, des circonstances particulières et notamment de leur bonne foi, conformément à la doctrine du service s’agissant de la mise en œuvre d’une nouvelle règlementation.
Bien que l’interdiction d’utilisation du mot gratuit soit en vigueur depuis le 2 novembre 2018, le fait que des emballages comportant cette mention aient été fabriqués avant cette date pourra par exemple être pris en compte.
[1] Exemple : l’achat d’un produit A donne droit au consommateur à un bon de réduction de x euros à valoir sur l’achat d’un produit B. L’ordonnance sera respectée si la réduction représente au maximum (seule ou cumulée avec d’autres avantages se rapportant au même produit) 34% du prix du produit B.
[2] Les parties au contrat peuvent choisir la manière de calculer le chiffre d’affaires prévisionnel : elles peuvent par exemple retenir le chiffre d’affaires net ou le chiffre d’affaires « ristournable », dont la définition relève de la liberté contractuelle (voir en ce sens avis CEPC n°17-47). Dans tous les cas, le calcul de la valeur des produits revendus en promotion devra se faire sur la même base.
[3] Par exemple, dans le cas d’un contrat portant sur des huîtres (produits de la pêche et de l’aquaculture) allant du 13 février 2018 au 12 février 2019 prévoyant un engagement de volume d’1 tonne. Une application arithmétique de l’encadrement en volume reviendrait à considérer que les promotions ne pourraient porter que sur 20 kg d’huîtres (25% de 2/12e d’1 tonne). Si les huîtres se vendent à 90% sur la période allant du 12 décembre (date d’entrée en vigueur de l’ordonnance) au 12 février, une application pondérée permettrait de vendre 225 kg d’huîtres en promotion (25% de 90% d’1 tonne).